Laurent Aubry : leader des patriotes de Saint-Hermas

Laurent Aubry dit Tècle naît à Saint-Laurent le 21 avril 1783. Il est le fils d’André Aubry dit Tècle et de Emerence Desmoulin. Résidant de Sainte-Scholastique, il est marié à Marie-Louise Lefebvre. Il est l’un des principaux leaders patriotes du comté des Deux-Montagnes. Il est sans contredit l’un de ceux qui a participé au plus grand nombre d’assemblées patriotes dans le nord de Montréal.

Sa participation politique débute lors de l’assemblée du 4 juin 1827 à Saint-Eustache lors de laquelle on discute des agissements, non seulement du gouverneur Dalhousie, mais aussi du seigneur Eustache-Nicolas Lambert-Dumont. Selon le témoignage du notaire Jean-Joseph Girouard, Aubry est destitué par le même seigneur et lieutenant-colonel Lambert-Dumont de son poste d’officier de milice des suites de son implication dans la dite assemblée. Le 3 juillet 1828, la cour formée par le seigneur Dumont, le major Stephen Mackay et le capitaine William Smith, entend les plaintes des différents capitaines démis de leurs postes d’officiers. Pour ce qui est d’Aubry, sa cause se termine dans la première séance de la cour et il est acquitté pour diverses raisons.

Son rôle durant les assemblées anticoercitives est cependant beaucoup plus marquant en 1837. En effet, il est présent lors de la grande assemblée des hommes du Nord tenue à Sainte-Scholastique le 1er juin 1837 dans le comté des Deux-Montagnes. Il seconde la 8e résolution proposée par Édouard Dorion selon laquelle l’assemblée doit nommer les membres d’un comité permanent chargé principalement de recueillir les griefs des habitants du comté des Deux-Montagnes et de les communiquer avec tout autre comité dans la province ou ailleurs. Il est lui-même nommé au sein de ce dernier pour la paroisse de Saint-Hermas en compagnie de J.-B. Deguires et J.-B. Labrosse.

Le rôle d’Aubry est d’autant plus marquant lors de la 3e séance du Comité permanent du comté des Deux-Montagnes tenue à Saint-Hermas le 16 juillet 1837 où il occupe le poste de président de l’assemblée. Il lit notamment la proclamation du gouverneur Gosford du 15 juin précédent concernant les assemblées publiques tenues dans les divers comtés de la province et l’ordre général de milice en date du 21 juin où l’on ordonne de lire la dernière proclamation. En réponse à celle-ci, Aubry rend public la lettre du lieutenant-colonel Ignace Raizenne.

Il est aussi président de l’assemblée du 15 octobre 1837 au rang Saint-Joachim à Sainte-Scholastique pour le comité permanent des Deux-Montagnes afin d’élire pour un an de nouveaux juges de paix. Aubry est encore nommé pour la paroisse de Saint-Hermas en compagnie des Labrosse, Danis et Cabanac. Il est de plus mandaté en tant que président à faire rapport au comité permanent du comté à la prochaine séance prévue le dimanche suivant. Il est finalement présent et fait un discours lors d’une réunion à Saint-Benoît le 22 octobre suivant. Il y fait la lecture de La Minerve et divers journaux, puis a fait rapport des procédés de la dernière séance.

Quelques semaines avant l’affrontement de Saint-Eustache en décembre 1837, Aubry prend le commandement des insurgés de la paroisse de Saint-Hermas. Cependant, les miliciens du capitaine Laurent Aubry ne rallient pas l’armée du Nord dirigée par Girod, Chénier et Girouard. Graduellement, la ferveur réformiste de la paroisse de Saint-Hermas va s’estomper jusqu’au jour fatidique du 14 décembre 1837. Girod est conscient du manque de souffle du capitaine Aubry et des patriotes locaux de la paroisse de Saint-Hermas. Nous pouvons peut-être avancer l’hypothèse que Aubry n’avait probablement pas les qualités de leader d’un Chénier à Saint-Eustache ou d’un Girouard ou un Dumouchel à Saint-Benoît.

À la suite du passage des troupes volontaires dans le comté des Deux-Montagnes, « à Saint-Hermas, il y eut un nombre considérable d’animaux et d’autres objets d’emportés. La superbe maison et dépendances du capitaine Laurent Aubry sont incendiées ». Effectivement, les gens de Gore et Chatham se reprennent en ravageant et détruisant de fond en comble les propriétés de Charles Chenay, Hercule Dumouchel, Joseph Fortier et Laurent Aubry. Il réclame plus tard à la Commission des Pertes un total de 389 £ et 6 sols « pour des biens et des effets brûlés par les troupes et les volontaires ». Il meurt à Saint-Hermas le 18 juin 1847 où il est inhumé trois jours plus tard.

Références :

AUBIN, Georges, Au Pied-du-Courant. Lettres des prisonniers politiques de 1837-1839, Montréal, Comeau & Nadeau, Agone, 2000, 458 p.

BERNARD, Philippe, Amury Girod. Un Suisse chez les Patriotes du Bas-Canada, Sillery, Septentrion, 2001, 255 p.

Centre de recherche Lionel-Groulx (C.R.L.G.), Lettre de Jean-Joseph Girouard à son ami Augustin-Norbert Morin, 27 avril 1838, P4, A2a, 2.2.

DUBOIS, abbé Émile, Le feu de la Rivière du Chêne. Étude historique sur le mouvement insurrectionnel de 1837 au nord de Montréal, Saint-Jérôme, J.-H.-A. Labelle, 1937, 341 p.

La Minerve, 5 juin 1837, 20 juillet 1837, 16 octobre 1837 et 16 novembre 1837.

LAPORTE, Gilles, Patriotes et Loyaux. Leadership régional et mobilisation politique en 1837-1838, Sillery, Septentrion, 2004, 415 p.

Les Cahiers d’histoire de Deux-Montagnes, « Le témoignage de Jean-Joseph Girouard », volume 11, no 1, juin 1989, p. 34-41.

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