Damien Masson

Né vraisemblablement à Saint-Benoît et baptisé en ce lieu, le 12 mars 1817, le marchand et ardent patriote de Saint-Benoît Damien Masson est le deuxième fils de Louis Masson, un marchand et officier de milice, et de Marie-Louise Choquet (Choquette). Il fait ses études au collège de Montréal de 1827 à 1831. Puis, de 1831 à 1832, il passe au séminaire de Sainte-Thérèse pour finalement prendre la relève de son père à son magasin.

À sa sortie de prison en 1838, il épouse à Saint-Martin Flore-Anastasie Brien dite Desroches le 3 février 1851 et se remet rapidement au travail et devient un des plus riches cultivateurs de la région de Saint-Benoît. D’autres sources nous disent qu’à la suite de l’exil de son frère, Damien a pris en charge sa maison rue Saint-Jean-Baptiste et se lance dans le commerce en compagnie des frères Dumouchel jusqu’à sa mort en 1877. D’après l’historien Robert-Lionel Séguin, à la suite du retour des Bermudes de son frère en novembre 1838, il exploite en sa compagnie un magasin à Saint-Anicet. Le commerce en question est mieux connu sous l’appellation : Masson & Cie. Masson se lance en politique active en 1856 lorsqu’il se porte candidat au siège de conseiller législatif de la division des Mille-Îles. Il perd néanmoins l’élection en faveur de son homonyme Édouard Masson, fils de Joseph Masson, dernier seigneur de Terrebonne. Entre-temps, il est président de commission scolaire de 1854 à 1863 et maire de la paroisse de Saint-Benoît de 1861 à 1866. Il tente de nouveau sa chance en politique active en 1867 en tant que député du comté des Deux-Montagnes à l’Assemblée législative. Il est toutefois défait par Gédéon Ouimet, futur Prermier ministre du Québec.

Dans les années 1830, plus particulièrement entre 1834 et 1837, Damien Masson est souvent vue en compagnie de son frère aîné, le docteur et chef patriote de Saint-Benoît Luc-Hyacinthe Masson avec lequel il partage ses convictions politiques. On peut donc supposer que le jeune commerçant participe aux assemblées où se trouve son frère. Il est notamment signataire d’une invitation à Saint-Benoît le 26 mars 1836 en vue du grand rassemblement prévu le 11 avril suivant. Son nom se retrouve aussi sur une autre invitation, mais cette fois pour la grande assemblée anticoercitive tenue à Sainte-Scholastique, le 1er juin 1837. Damien Masson a aussi participé à plusieurs randonnées avec son frère et le docteur Henri Cartier de Vaudreuil afin de recueillir l’appui des habitants de cette région et, possiblement, des armes et des munitions en vue d’une éventuelle résistance.

Durant le bouillonnement sociopolitique de 1837, le jeune marchand de 21 ans continue néanmoins de s’occuper de son commerce car il fait imprimer du papier-monnaie pour pallier le manque d’argent liquide qui sévit à l’époque tout comme le marchand anglophone James Watts, de la même paroisse.

D’après une liste établit par l’abbé Clément Laurin concernant les différentes charges ou fonctions pour le camp armé de Saint-Eustache en décembre 1837, Damien Masson occupe le grade de lieutenant. Dans l’après-midi du 14 décembre 1837, le chef Amury Girod quitte le champ de bataille de Saint-Eustache pour aller chercher des renforts à Saint-Benoît. Après une visite fortuite chez le notaire Jean-Joseph Girouard, il se rend chez le docteur Masson où il est accueilli par les deux frères qui lui reprochent aussitôt sa lâcheté. Furieux, Girod dégaine un pistolet tandis que le docteur Masson s’empare d’un tisonnier, mais le jeune Damien s’interpose à temps pour arrêter la dispute : « Nous n’avons pas de temps à perdre. Allons au secours de Chénier avec tous ceux que nous pourrons soulever et entraîner ; nous emmenons Girod avec nous. »

Toutefois, après la fuite du général Girod et la mort de Chénier, les deux Masson comprennent vite que la situation est impossible et décident donc de se diriger vers le sud, aux États-Unis. Ils sont interceptés dans la nuit du 15 au 16 décembre 1837 par un groupe de volontaires de Côteau-du-Lac dirigé par le capitaine McIntyre. Ils sont immédiatement conduits à la prison de Montréal au Pied-du-Courant. Accusé de haute trahison, comme tous les autres insurgés constitués prisonniers, Damien Masson n’est libéré que le jour de l’amnistie générale proclamée par lord Durham le 23 juin 1838 moyennant 1 000 £ de caution.

Quelques cultivateurs de Saint-Benoît affirment dans une déposition commune que Damien Masson n’a jamais été vu dans les troubles et n’a participé à aucun rassemblement politique ; qu’il n’a jamais pris les armes pour se défendre et qu’il n’a jamais fait de discours séditieux envers le gouvernement. Bref, qu’en un mot sa conduite a toujours été si douce et si paisible que personne, pas même ses ennemis les plus acharnée ne peuvent avancer et prouver qu’il a excité quelqu’un à la révolte. Plus tard, il réclame néanmoins à la Commission des Pertes un total de 762 £, 2 sols et 6 deniers de dédommagement pour les pertes encourues à ses propriétés ou à ses biens au moment des troubles.

Physiquement, d’après l’historien Laurent-Olivier David, Damien et son frère Luc-Hyacinthe Masson sont en 1837 deux gros et grands garçons, aux yeux noirs, au teint bronzé, aux épaules robustes et au caractère déterminé. On dit aussi du jeune Masson qu’il est de forte corpulence vers la fin de sa vie avec un poids de 400 livres ! Ayant la confiance du peuple, on le dit affable. Il est possiblement décédé le 24 octobre 1877 ou le 22 juillet précédent.

Références :

BAnQ, « Documents relatifs aux événements de 1837-1838 », Fonds Ministère de la justice, M-165-2, no 820, certificat signé par François Vézina, Joseph Lalonde, Basile Étienne, André St-Amand, Charles Routier, Toussaint Brisebois et François-Xavier Groulx, en faveur de Damien Masson, 20 décembre 1837.

BAnQ, greffe de Félix-Hyacinthe Lemaire, 19 avril 1877, minute 5839, testament de Damien Masson.

AUBIN, Georges, Au Pied-du-Courant. Lettres des prisonniers politiques de 1837-1839, Montréal, Comeau & Nadeau, Agone, 2000, 458 p.

BOILEAU, Gilles, 1837 et les patriotes de Deux-Montagnes. Les voix de la mémoire. Montréal, Éditions du Méridien, 1998, 201 p. (coll. « Mémoire québécoise »).

DAVID, Laurent-Olivier, Les Patriotes de 1837-1838, Montréal, Eusèbe Senécal & Fils Imprimeurs-Éditeurs, 1884, 297 p.

DAVID, Laurent-Olivier, Gerbes canadiennes, Montréal, Librairie Beauchemin Ltée, 1921, no 1571, 328 p.

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DUBOIS, abbé Émile, Le feu de la Rivière du Chêne. Étude historique sur le mouvement insurrectionnel de 1837 au nord de Montréal, Saint-Jérôme, J.-H.-A. Labelle, 1937, 341 p.

FAUTEUX, Aegidius, Les Patriotes de 1837-1838, Montréal, Éditions des Dix, 1950, 433 p.

FILTEAU, Gérard, Histoire des Patriotes, Montréal, Éditions de l’Aurore, 1er trimestre 1975, édition originale parue en 1938, 495 p.

GIROD, Amury, Journal tenu par feu Amury Girod, Traduit de l’allemand et de l’italien, 1838, paru dans le Rapport de l’archiviste du Canada, 1923, p. 408-419, réédition dans 1837 et les patriotes de Deux-Montagnes. Les voix de la mémoire, Montréal, Éditions du Méridien, 1998, p. 115-148.

LAPORTE, Gilles, Patriotes et Loyaux. Leadership régional et mobilisation politique en 1837-1838, Sillery, Septentrion, 2004, 415 p.

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LAURIN, Clément, « Administration parallèle du comté de Deux-Montagnes par les Patriotes en 1837 », Cahiers d’histoire de Deux-Montagnes, vol. 5, no 2, octobre 1982, p. 25-28.

MASON, Henri, Joseph Masson, dernier seigneur de Terrebonne 1791-1847, Montréal, Henri Masson, 1972, 355 p.

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SÉGUIN, Robert-Lionel, Le mouvement insurrectionnel dans la Presqu’île de Vaudreuil 1837-1838, Montréal, Librairie Ducharme Ltée, 1955, 157 p.

SENIOR, Elinor Kyte, Les habits rouges et les patriotes. Montréal, VLB Éditeur, 1997, édition originale parue en 1985 sous le titre Redcoats and Patriots, 313 p.

The Vindicator, 1er avril 1836 et 16 mai 1837.

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VALLIÈRES, Marc-Gabriel, « Saint-Benoît au temps des Patriotes », La Revue des Deux-Montagnes, no 8, octobre 1997, p. 5-27.

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