On dénonce le curé Turcotte

L’accusation dont il est question ici a été réalisée devant le juge de paix Pierre-Édouard Leclère en date du 22 février 1839. Elle concerne le cas de l’énigmatique et controversé curé de Sainte-Rose, François-Magloire Turcotte. C’est une certaine Sophie Manthet, âgée de 26 ans, de la même paroisse qui réalise la déposition à son endroit.

Dans sa déposition, elle affirme que vers la fin d’octobre 1838, elle était à « passer la veillée » chez une dame du nom d’Ousterout, à Sainte-Rose. Les deux dames étaient accompagnées du curé François-Magloire Turcotte, alors déjà reconnu dans la région pour son allégeance « ambiguë » durant la résistance armée de l’année précédente, ainsi qu’une demoiselle Banon, sa nièce, et de quelques autres.

Elle dit que durant « le cour de la conversation, il fut question de l’état critique dans lequel se trouvait alors le pays et M. Turcotte y prenait une part active ». Elle poursuit en disant : « Je lui entendis dire que les troubles commenceraient bien vite et que cette révolution serait pire que la Révolution française, qu’il y aurait massacre général, qui ne pourrait être arrêté que par la permission de la providence. » Aux dires de la déposante, qui rapporte les paroles du prêtre, ce dernier aurait aussi affirmé « que presque tous les habitants étaient patriotes en bas de Québec ».

Durant cet échange, « il offrit en cette occasion de remettre entre les mains du Michel Charrette, notaire, une lettre scellée, qui contiendrait un récit de tous les troubles qui devaient arrivées, à condition que cette lettre ne serait ouverte par le dit Charrette qu’après les troubles finis, et qu’alors il verrait que tout ce qu’il avait écrit arriverait pendant ces troubles ». Le notaire concerné refusa systématiquement cette offre qui ne manqua pas d’effrayer la déposante.

Selon le témoignage de Mlle Manthet, le curé Turcotte quitta sa paroisse dans la nuit du 1er novembre 1838, afin de gagner la frontière américaine en compagnie des nommés Jean-Baptiste Filiatreau, Eusèbe Ouimette et Sévère Chartrand. D’après elle, les troubles commencèrent peu après le départ de l’ecclésiastique, soit dans la nuit du 3 au 4 novembre.

Toujours selon la déposante, cette dernière demeure convaincue que le dit Turcotte « était au fait » du soulèvement projeté et « dont le but était de renverser le gouvernement existant ».

Référence :

BAnQ, Fonds du banc du roi/de la reine du district de Montréal, TL19, S1, SS62, D226, déposition de Sophie Manthet, 22 février 1839.

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